C'est en Argentine que nous avons compris que nous n'aurions pas le montant que l'on espérait avoir quand il sera temps de vendre Road Runner... Après à peine 100 kilomètres dans ce pays, le moteur de notre pauvre bête s'est tout simplement arrêté. Encore chanceux dans notre malchance, elle a décidée de nous abandonner dans le seul village qui était sur notre route pour les 500 prochains kilomètres. Nous sommes allés voir des garagistes dont le commerce était à une rue de là et ils ont acceptés de la tirer pour essayer de la réparer. En l'observant, ils nous ont dit (encore une fois) que le véhicule était trop rouillé et que les pièces commençaient à se briser par elles-mêmes. C'était effectivement le cas du tuyau d'échappement, qui s'était carrément cassé en deux à la base. Ils l'ont donc ressoudé et, tant qu'à être dans un garage, nous en avons profité pour faire un changement d'huile. La chose qu'on ignorait, c'est que l'huile synthétique est très chère en Argentine... TRÈS chère... Les 8 litres de cet or liquide nous ont coûté 300$ à eux seuls, les réparations en sus. Disons que ça fait mal au budget, mais au moins, nous avons pu continué notre périple en nous dirigeant vers la ville touristique de El Chaltén, où nous allions voir le célèbre cerro Fitz Roy. Le lendemain, après une nuit en plein milieu de la pampa argentine, nous avons fait notre deuxième crevaison. Il faut dire que la précarité de la route n'était pas la seule cause de cet évènement malheureux. Le pneu en question était complètement usé et il ne demandait qu'à rendre l'âme. En le changeant, le cric s'est complètement enfoncé dans le frame tout rouillé de Road Runner, ce qui a un peu compliqué les choses. Rendu là, nous avons profité de l'absurdité de la situation pour rire un bon coup. C'est donc deux jours plus tard, après avoir installé nos tentes à mi-chemin sur le sentier que nous nous sommes retrouvés face à ces sommets et à ces petites lagunes glaciaires turquoises.


Après cette journée incroyable, nous avons regagné le campement où nous avons dormi dans le froid avoisinant 0 degré. Le lendemain matin, c'est dans la pluie que nous avons plié bagages et nous avons ainsi décidé de laisser tomber la randonnée de la deuxième journée pour continuer notre chemin. Après avoir fait réparer notre pneu de secours sur la fesse dans un petit garage un peu louche, nous nous sommes dirigés vers notre prochaine destination: la jolie ville de El Calafate et son attraction principale: le grandiose glacier Perito Moreno, à quelques kilomètres de là. Nous avons donc passé deux nuits dans une belle et chaleureuse auberge, entrecoupées par notre visite au parc national où nous avons payé dix fois moins cher grâce à des papiers falsifiés qui nous faisaient passer pour des étudiants argentins! Une promenade en bateau près du glacier a complété cette journée qui, encore une fois, fut magnifique.


Après El Calafate, c'était déjà le temps de se rendre à Punta Arenas, la destination finale de Guillaume et Alain. Nous nous sommes donc reposés dans cette ville où nous avons décidé de mettre un terme aux péripéties de Road Runner sur la route, pour éviter d'autres problèmes. De plus, c'est dans cette ville où il existe une zone sans taxe que nous étions supposé la vendre. Après avoir contacté plusieurs personnes et être allé dans des garages qui rachètent les véhicules usagés, nous avons du faire face à la réalité et briser nos illusions: on allait se départir d'elle pour très peu d'argent... L'option de la fourrière est même venu nous décourager mais finalement un Américain a décidé de l'acheter pour 2000$ US, ce qui équivaut à environ 2500$ canadiens, soit quatre fois moins cher que ce qu'on espérait au départ. Nous nous sommes dit qu'au moins, nous nous étions (presque) rendus au bout du continent et à notre destination. Nous avons laissé tomber Ushuaïa car il fallait régler la vente et que de toute façon, à part être le bout du monde, Ushuaïa n'avait pas grand chose à offrir. Pendant une semaine, nous avons donc fréquenté les cafés et les restaurants de Punta Arenas, tout en se promenant avec Road Runner pour alterner les endroits où nous dormions. Une nuit, nous avons passé proche de se faire cambrioler, alors que Fred a réussi à démarrer le moteur avant qu'un assaillant armé d'un marteau s'en vienne fracasser la vitre du véhicule, qu'il croyait assuré vide. Puisque nous étions sur le point de quitter la ville pour une semaine et demie pour aller faire notre randonnée au parc national de Torres del Paine, nous avons trouvé un petit camping où nous avons pu stationner Road Runner pour qu'elle soit en sécurité. C'est donc en faisant du pouce que nous sommes partis vers Puerto Natales, la ville où nous allions dormir avant d'entamer notre trek de 8 jours et de 125 kilomètres, qui allait s'avérer être une des plus belles activités de tout notre voyage...